Lecture : « D’Entrecasteaux à la recherche de La Pérouse » de Jean-Pierre Ledru

Jean-François de Galaup de La Pérouse

Jean-François de Galaup de La Pérouse

Antoine de Bruni d'Entrecastaux

Antoine de Bruni d’Entrecasteaux

On connaît bien, aujourd’hui, le sort advenu à l’expédition du capitaine de vaisseau Jean-François de La Pérouse, perdue corps et biens dans les Iles Salomon en 1788. Ce que l’on connaît beaucoup moins bien, en revanche, c’est l’histoire de l’amiral Antoine de Bruni d’Entrecasteaux parti à sa recherche en 1791 à la demande de Louis XVI, et dont le sort ne fût guère plus enviable.

C’est cette expédition méconnue que Jean-Pierre Ledru nous raconte, dans le langage imagé des marins de l’époque, à travers le regard d’un « pilotin » normand embarqué pour le meilleur et pour le pire (¹).

Rappel historique : La disparition de La Pérouse

En août 1785, Jean-François de Lapérouse quitta le port de Brest, chargé par Louis XVI de conduire une prestigieuse expédition de découverte destinée à compléter les trois voyages de Cook. Pendant plus de trois ans, les deux vaisseaux de l’expédition, la Boussole et l’Astrolabe, vont parcourir tous les océans du globe, sous toutes les latitudes et par tous les temps. La Pérouse avait annoncé dans sa dernière lettre quel devait être son parcours et l’époque probable de son retour, vers l’été 1789. Mais après avoir quitté la Nouvelle Hollande (actuelle Australie) plus aucune nouvelle. Les deux vaisseaux du roi disparaissent dans l’immensité du Pacifique sud, et la Révolution éclate en France.

On connait, désormais, le lieu ou chavirèrent les deux navires de La Pérouse, sur l’île Vanikoro dans les Iles Salomon. Depuis plus de trente ans, l’association Salomon en Nouvelle-Calédonie a entrepris des campagnes de fouilles, dont la dernière en 2008, afin de lever le mystère du naufrage, et plusieurs films on été réalisés sur ces recherches. (²)

L’expédition de Bruni d’Entrecasteaux

Sans nouvelles depuis son dernier appareillage le 10 mars 1788, l’Assemblée constituante décréta le 28 février 1790 qu’une prime serait accordée à tout marin donnant des nouvelles de La Pérouse. Le roi mandata le contre-amiral Bruni d’Entrecasteaux afin de mettre sur pied une nouvelle expédition, avec principale mission de rechercher La Pérouse.

Le 28 septembre 1791, 210 marins et 12 savants quittèrent Brest, répartis sur deux gabares, ou fausses frégates (³), commandées par d’Entrecasteaux : la Recherche et l’Espérance. Elle atteignit la Nouvelle Hollande dont elle fit le tour en 1792 en remontant vers la Nouvelle Calédonie puis les Iles Admiralty. Un second tour en 1793 amena l’expédition à proximité d’une île nouvelle que d’Entrecasteaux baptisa « île de La Recherche », mais il n’y débarqua pas. C’est sur cette île, appelée aujourd’hui Vanikoro, que les survivants de l’expédition La Pérouse avaient fait naufrage. L’expédition poursuivit sa route vers Surabaya sans jamais l’atteindre. Les équipages furent décimés par les privations et les maladies, d’Entrecasteaux perdit la vie le 23 juillet 1793, les navires furent arraisonnés par les hollandais en guerre contre la France et les révolutionnaires, et des 222 personnes embarquées, seulement une vingtaine revinrent à Brest le 5 février 1795. Louis XVI avait été décapité en janvier 1793, et La Pérouse était tombé dans l’oubli.

Expédition d'Entrecasteaux

Expédition d’Entrecasteaux

Jean-Pierre Ledru, après de patientes et minutieuses recherches historiques, nous dépeint les quatre années de cette expédition tragique à travers le personnage romancé de son héros principal, le pilotin François Deschamps. Il nous fait aussi revivre la vie et les coutumes des marins normands et bretons dans cette époque difficile où la société française virait de bord. Une histoire passionnante, écrite avec simplicité par un remarquable érudit.

(²) Pour en savoir plus, voir le site Collection La Pérouse
(³) Une gabare de mer était un bâtiment ponté, de 120 à 450 tonneaux de jauge selon l’époque, gréé de un à trois-mâts, destiné au transport de marchandises. Les gabares étaient particulièrement utilisées, dès les années 1715, pour le transport des bois de charpente vers les arsenaux royaux, mais aussi pour le transport d’autres marchandises volumineuses. Les plus importantes étaient armées de 10 à 20 pièces de canons de 4 ou 8 livres, parfois 12. On les appelait parfois « fausses frégates » pour leur ressemblance avec ces types de bâtiments.
Facebooktwitterlinkedinmail